Depuis Maastricht, tous nos économistes et nos politiques avaient en tête une désindustrialisation progressive de la France. Les premiers indices sont apparus en 2001 au moment du passage à l’euro. Depuis maintenant plus de 15 ans, ce constat fait l’unanimité. Et pourtant la décroissance industrielle se poursuit.
Une France sans maintien d’une industrie performante, peut-elle être une France de progrès ? Bien sûr, il est toujours possible de réagir. Mais comment ? Dans quelles conditions ? à quel prix ? Et avec quelles compétences ? dans quels domaines et à quel prix ? le pari est loin d’être gagné dans un contexte international instable, avec une concurrence européenne et mondialisée sans partage un grand nombre de mesures réglementaires et financières pour espérer y remédier, mais l’essentiel est-il là ?
Répartition du nombre de salariés par secteur – source : Statistica & Insee
Une situation inquiétante mais qui peut évoluer
La réalité économique française est multi-facettes. Pour mieux la comprendre, il est préférable de l’apprécier en fonction des secteurs d’activités, de la taille et de la nature des entreprises. Fin 2023, sur 30 millions de salariés, l’ensemble de l’activité économique dans le domaine privé se décline de la façon suivante : agriculture et industries agro-alimentaires (2%) ; industries, énergie, transports (11,5%) ; bâtiment et travaux publics (6,5%) ; commerce (22%) ; services (38%) et enfin éducation, santé, action sociale (15%), autres (5%). Mais qui sont les véritables acteurs de cette économie ? Ce qui signifie que le secteur industriel représente un peu plus de 3,6 millions de salariés.
Le presque partout caractérise le secteur industriel – montage CE21
Sur la même période, l’Allemagne a elle aussi perdu plus de 500.000 emplois industriels ! Mais, pays en priorité producteur et exportateur, elle préserve un tissu économique bien mieux structuré et plus important avec près de 7.500.000 emplois industriels qui représentent près de 25% des actifs. Nul ne peut oublier que l’Allemagne bénéficie de circonstances très particulières pour satisfaire ses cahiers des charges. En effet, au-delà de l’influence du marché, si le savoir–faire existe, une partie importante de son activité et de sa production est sous-traitée à moindre coût chez « elle » ou dans les anciens pays de l’Est dans des conditions sociales tout à fait discutables.
Les grands secteurs « porteurs » ne manquent pas. Il faut les rappeler principalement dans la métallurgie et l’automobile du futur, au-delà de « la voiture électrique » de passage. L’électronique et les télécommunications, l’aéronautique et le spatial, le transport à grande échelle, l’énergie et le nucléaire tiennent aussi le « haut du pavé ». Ajoutons à cela les secteurs de la santé, du développement de la lutte contre la pollution et du réchauffement climatique. De leurs côtés, les nouvelles technologies « high tech », le numérique comme l’Intelligence Artificielle, ont besoin d’experts et de forts investissements. Paradoxalement cela va aussi bien des domaines de la mer, de l’agriculture et de l’alimentation, comme de celui de la préservation de l’environnement à ceux de la sécurité. Ne pas oublier le secteur de la santé et les recherches associées…
Préserver et développer notre savoir-faire industriel
Assez du surplace dans la recherche, la création et l’innovation industrielle – montage : CE21
Toutes ces mutations et ces changements ont lieu dans un contexte imposé par la concurrence mondialisée, dans un espace-temps réduit. Les échanges se font désormais contraints par ce modèle non maîtrisable. A charge pour nos actionnaires, dirigeants privés et publics, d’assumer leurs responsabilités en montrant qu’ils sont aussi capables de préserver notre capital de « savoir-faire », nos outils et nos compétences pour favoriser un devenir pour la France. Mais qui croire ? A qui peut-on faire confiance, sinon à nous-mêmes ? Alors politiques, financiers, grands patrons de l’industrie, syndicats et salariés, bougez-vous !
Jacques Martineau