En cas de conflit au niveau mondial ou de crise grave comme c’est le cas aujourd’hui avec la guerre entre l’Ukraine et la Russie aux frontières de l’Union européenne et de l’OTAN, nul n’est en mesure d’en tirer les conséquences à court, moyen ou long terme. Au plan national les conséquences pour le France peuvent affecter des secteurs entiers, financier, économique, social, sanitaire, et bien entendu de la défense qui seront peut-être à l’arrêt au motif de la détérioration, voire le refus de relation entre l’Est et l’Ouest face à la Russie et ses alliés des BRICS élargis. Les conséquences mondiales géostratégique géopolitique ne sont pas imaginables et chiffrables.
Les clés à la « Maison Blanche » ?
Après le clash à Washington, il est difficile d’imaginer que la fin de la partie trouvera une issue rapidement. La première étape d’un cessez-le-feu est déjà contestée sous prétexte de la tentative de renouer le dialogue avec la Russie, l’agresseur. En attendant, ce n’est pas sans difficulté, voire brutalement, la « Maison Blanche » rappelle qu’elle est maitresse du jeu et que la partie principale se fait avec le Kremlin, en Arabie Saoudite. L’Ukraine n’a d’autre choix que de suivre. Le pouvoir américain conditionne son soutien à un accord avec l’Ukraine à l’exploitation et à la cession de « terres rares ». Mais après un cessez-le-feu et à long terme la signature d’un traité de paix, qui pourra garantir la sécurité de l’Ukraine en veillant à son application ? Les États-Unis ne peuvent pas et ne veulent pas se trouver impliquer par obligation dans cette mission comme membre principal de l’OTAN. Les raisons de ce choix : l’Ukraine n’est pas membre de l’OTAN et les pays européens membres de l’OTAN doivent désormais en assumer leur part dans le coût des opérations.
État des lieux, clash et réaction dans l’Union et au Royaume-Uni – montage : clubespace21.fr
Aller vers une autonomie stratégique et opérationnelle
Depuis l’invasion de l’Ukraine par la Russie en 2022, la question de l’autonomie stratégique européenne est devenue un sujet central. Les récentes hypothèses et les doutes générés par l’actuel recul de la garantie sécurité américaine régénère la question de la défense européenne. La critique de la politique américaine est une chose. Qu’elle provoque des réactions peut se comprendre. Mais la priorité n’était-elle pas ensemble, principaux pays européens, membres de l’OTAN, de s’opposer et de tenter de convaincre nos alliés d’outre-Atlantique que nous étions prêts à aller dans leur sens, moyennant des séries de nuances ? Non, l’influence et la négociation n’étaient pas à l’ordre du jour. C’est au contraire une opposition affirmée qui a motivé des séries de réunions intra-européennes informelles. Elles ont été organisées à l’initiative française. La « tempête à Washington » a été suivie d’un sommet britannique élargi à des membres de l’OTAN non européens. Le soutien à l’Ukraine ne se discute pas. Le Conseil européen a adopté une politique de réarmement des pays de l’Union pour pallier un éventuel retrait partiel des États-Unis. En ouvrant une liberté de dépenses de l’ordre de 800 Md€ (150 Md€ de crédit garantis par la BEI ; 650 Md€ à valoir en oubliant le pacte de stabilité). Une manière de manifester devant le couple États-Unis–Russie pour pouvoir participer avec l’Ukraine aux négociations.
Face aux données de l’OTAN et la présence américaine, comment faire mieux à court ou moyen terme ? - montage : clubespace21.fr
Cette nouvelle stratégie marque un tournant décisif pour l’Europe, qui cherche à s’émanciper de sa dépendance aux États-Unis en matière de sécurité. L’accroissement et l’appropriation d’un armement conventionnel européen est indispensable et urgent. L’objectif est double : renforcer les capacités industrielles de production d’armement, en France et dans l’UE, et assurer une meilleure coordination des efforts militaires entre les États membres. En proposant d’inclure les armes nucléaires dans le débat sur une Europe de la défense, notre président cherche à imposer son leadership. Définir et laisser entendre quels sont les intérêts vitaux de la France n’a pas de sens. Et ce d’autant qu’il s’agit d’une force dissuasion française qui par définition n’a pas pour objectif de s’en servir ! Aucun « ego » politique ne peut justifier un tel choix hâtif dans la précipitation, face à une menace supposée mais non identifiable. Et ce, d’autant plus, dans la situation financière, économique et sociale où nous sommes. L’exemple de la façon dont est traité le problème de la sécurité en France dans toutes ses acceptions n’est pas une référence !
Premier accord Ukraine -États-Unis à Djeddah pour un cessez-le-feu temporaire
C’est de l’avenir de l’Europe et du Monde dont les dirigeants occidentaux ne cessent de parler. Le premier accord entre l’Ukraine et les États-Unis a été signé en Arabie Saoudite pour proposer un cessez-le-feu de 30 jours à la Russie. Pour les pays de l’Union, le problème est entier alors qu’après le cessez-le-feu qui s’imposera inévitablement, il est impossible que les Américains ne jouent pas les gardiens d’un statut quo, en quête d’un traité de paix qu’ils feront respecter dans tous les cas de figure. Non, les États-Unis resteront nos alliés étant entendus que la coopération européenne au coût et au réarmement soit concrète. Cela d’autant plus qu’il sera question de sauvegarder leur sécurité et leurs intérêts commerciaux et financiers.
États-Unis et Ukraine signent un accord de cessez-le feu de 30 jours proposé à la Russie – montage : clubespace21.fr
Les États-Unis ne quitteront pas l’OTAN, même s’ils devaient physiquement et financièrement se tenir en retrait. Une Europe de la défense à caractère conventionnel ne pourrait se limiter qu’à quelques États (France, Royaume-Uni (hors UE), Allemagne, Italie, Pologne et (Cie…) en mesure d’avoir dans le domaine de la défense, la crédibilité d’une véritable valeur ajoutée face une future menace potentielle russe. Il faudra en repenser l’architecture, l’organisation, le commandement et étudier comment cette force européenne est compatible avec l’OTAN. Mais attention, l’échelle de temps nécessaire à ce recouvrement peut atteindre une dizaine d’années que la Russie mettra aussi à son profit pour se renforcer et réparer ses dégâts. La politique de défense américaine aura elle-aussi évolué...
Jacques Martineau