Le 2 septembre 2024, une crainte s’est propagée comme une traînée de poudre dans les couloirs de Bercy. Les documents budgétaires envoyés par Bruno Le Maire, ministre démissionnaire de l’Économie, et Thomas Cazenave, ministre délégué aux Comptes publics, ont révélé un risque de dérapage du déficit public pour l’année 2025.
Alors que le gouvernement sortant visait un déficit de 5,1% du PIB pour 2024, déjà beaucoup trop élevé, les projections indiquent que ce chiffre pourrait atteindre 5,6% sans intervention corrective, donc des économies et de l’austérité. Une nouvelle qui remet en question les objectifs de stabilité budgétaire fixés par le gouvernement et, surtout, l’Union européenne.
L’alerte de Bercy : Une croissance revue à la baisse et des recettes fiscales en chute libre
Le contexte économique actuel ne laisse guère de place à l’optimisme. Comme le dévoile le journal Les Echos ce lundi 2 septembre 2024, le ministère de l’Économie table désormais sur une croissance de seulement 1,1% pour les années 2024 et 2025, en baisse par rapport aux prévisions initiales de 1,4%.
A chacun sa propre responsabilité dans des contextes différents – source : Insee
Cette révision à la baisse complique encore davantage l’équation budgétaire, les rentrées fiscales étant moins bonnes que prévu, notamment pour la TVA, l’impôt sur le revenu, et l’impôt sur les sociétés. Ces recettes en chute libre accentuent la pression sur les finances publiques, rendant la perspective d’un déficit qui serait même supérieur à 5,6% du PIB de plus en plus probable.
Déficit public qui dérape : la faute aux collectivités locales ?
Un autre élément qui inquiète le gouvernement démissionnaire est le dérapage spectaculaire des finances des collectivités locales, qui pourrait à lui seul alourdir les comptes publics de 16 milliards d’euros en 2024. Cette augmentation rapide des dépenses locales ajoute un poids supplémentaire sur le budget national, déjà fragilisé.
Déficit de l’État : Recettes – Dépenses (2017 – 2024) – source : France-inflation.com
Bercy avait pourtant proposé, début 2024, un projet de loi de finances rectificative (PLFR) qui incluait un mécanisme contraignant sur les collectivités locales, rappelle Les Echos. Ce mécanisme, rejeté par Emmanuel Macron, prévoyait une diminution de leur dotation globale de fonctionnement (DGF) en cas d’absence d’économies. Le rejet de cette mesure est désormais perçu comme une occasion manquée de redresser les finances publiques.
Que pourra faire le gouvernement pour redresser la situation des finances publiques françaises ?
Le prochain Premier ministre, qu’Emmanuel Macron tarde à nommer et qui aura la lourde tâche de gérer cette situation critique, devra trouver environ 15 milliards d’euros pour ramener le déficit à l’objectif de 5,1% en 2024. L’austérité annoncée semble désormais inévitable, ce qui risque de peser sur les ménages, le gouvernement semblant refuser toute option pour augmenter la fiscalité des plus riches.
Plusieurs options sont envisagées pour atteindre cet objectif : la taxation des rentes des énergéticiens et des rachats d’actions pourrait rapporter 3 milliards d’euros en 2024. De plus, le gouvernement sortant a laissé 16,7 milliards d’euros de crédits gelés, dont le prochain gouvernement devra décider de l’annulation partielle ou totale. Néanmoins, même avec ces mesures, il est probable que le déficit final se situe entre 5,1% et 5,6%, selon des sources au sein de l’exécutif relayées par Les Échos.
Fin octobre : le verdict budgétaire et les conséquences – montage : clubespace21.fr
Déficit : la France file tout droit vers une sanction européenne
Le risque de dépassement du déficit au-delà de 5,6 % en 2024 est particulièrement préoccupant dans le cadre du pacte de stabilité de l’Union européenne. Ce pacte impose aux États membres de maintenir leur déficit en dessous de 3 % du PIB, un seuil que la France pourrait largement dépasser si des mesures correctives ne sont pas mises en œuvre rapidement.
Un tel dérapage pourrait entraîner des sanctions de la part de l’UE, compliquant encore davantage la situation économique du pays. D’ailleurs, l’Union européenne surveille de près la France à ce sujet et se préparerait à sévir.
Paolo Garoscio (Économie Matin)