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La politique extérieure de l’Union européenne

Entre espérance et désespérance !

L’impact de la politique extérieure de l’Union européenne n’est pas à la hauteur de ce qu’elle représente potentiellement. L’absence d’une politique intérieure commune se fait sentir dans la plupart des domaines : économiques et sociaux, financiers et aussi dans le secteur de la défense.

Aujourd’hui, l’Union européenne est constituée d’une association d’états et de peuples unis par une volonté et des règles communes autour d’un même projet : vivre ensemble en paix dans un espace de liberté, de paix et de justice. Depuis presque 60 ans ce projet continue de se développer et à apporter cette paix à des nations et des peuples qui n’avaient cessé de se déchirer pendant des décennies. Mais l’Union européenne n’a pas atteint son point d’équilibre.

Le modèle européen est en crise…

L’Union Européenne n’est pas une entité centralisée, elle n’est ni une entité fédérale ni une entité confédérale. L’Europe se cherche et la crise qu’elle subit depuis plusieurs années, exacerbe le débat. Certains politiques proposent de continuer une marche en avant vers une union plus intégrée notamment en terme de défense et de politique étrangère, imaginant une sorte de fédération semblable aux différents modèles existants (Etats-Unis, Russie, Inde, Brésil). D’autres jugent plus prudent de ne rien faire, préférant le statuquo. A noter qu’une minorité de plus en plus agissante plaide pour un retour à une communauté d’états souverains unis par quelques objectifs et quelques règles communes. Quoiqu’il en soit, le modèle Européen est en crise. Cette crise se manifeste sous de multiples aspects. Elle fait sentir tout son poids sur l’économie et la vie quotidienne des citoyens européens. La crise rend peu crédible l’influence d’une politique étrangère européenne qui manque de cohérence. Dans les faits, l’Union européenne pèse très peu sur les affaires du monde. N’oublions pas que La France et le Royaume-Uni sont membres permanents du Conseil de sécurité des Nations unies, tandis que l’Union européenne n’a qu’une présence de délégation non consultative.

Négociation avec l’Iran - Source : Reuters


 
Parler d’une « puissance » européenne au sens actuel est un leurre. Ce qualificatif dans son acception la plus large caractérise les Etats-Unis, la Chine, l’Inde et la Russie. Il est totalement inadapté pour l’Union européenne. La confusion vient de cette idée d’intérêt européen sans stratégie et dominé par une politique du « chacun pour soi » non solidaire derrière une communauté de libre-échange. La mise en valeur des meilleurs et le pointé du doigt des moins performants rythment les échanges au niveau européen. La politique extérieure européenne est une mécanique complexe. Cette machine tourne à vide avec un faible rendement et une efficacité réduite, sans commune mesure avec les moyens dont elle dispose et l’économie qu’elle représente avec ses 28 Etats.

Non, il n’existe pas de politique extérieure européenne définie et cohérente pour défendre des intérêts « nationaux » en interne ou « européens » au plan international.

La place économique de l’UE à l’international

Directement impliqué dans des affaires européennes au cours de sa vie professionnelle l’auteur a partagé un fort un sentiment d’impuissance et une certaine amertume. Il a subi des situations où l’absence de politique crédible et efficace de l’Union européenne et de ses états membres était flagrante face aux poids lourds de la scène internationale que sont les Etats-Unis, la Chine, l’Inde, la Russie. Même vis à vis de pays perturbateurs de moindre envergure comme l’Iran, ces manques de soutiens cohérents se faisaient sentir à son détriment dans des dossiers dont dépendaient pourtant la sécurité, le développement ou la conception de la démocratie que l’UE veut promouvoir !

L’Union Européenne est un poids lourds en terme de ressources financières, économiques et humaines. Avec seulement 7,3 % de la population mondiale, elle est de loin la première puissance commerciale au monde. Elle constitue un pôle économique de toute première importance avec un PIB supérieur à celui des Etats-Unis, le Japon et la Chine. L’Union européenne dispose de ressources humaines et techniques sans équivalent avec une population ayant un niveau d’éducation plus élevée qu’ailleurs, elle dispose d’industries de capacité de recherche et d’innovation. Malgré ce poids économique considérable, elle n’est toujours pas une grande puissance politique.

Avec l’entrée en vigueur du traité de Lisbonne adopté en décembre 2009 qui remplaçait les traités de Rome (1957) et Maastricht (1992), Amsterdam (1999) et Nice (2003), l’Union Européenne s’était dotée d’une gouvernance et d’une structure qui devaient lui permettre de rendre son action plus visible et mieux faire entendre sa voix. L’ancienne structure avec une présidence du Conseil changeant tous les six mois était particulièrement incompréhensible et opaque pour tous les acteurs extérieurs à l’Union. Les rôles du Parlement, du Conseil et de la Commission ont été redéfinis notamment. Le rôle du parlement dans la conduite de la politique européenne a aussi été renforcé.

Catherine Ashton - Source : Reuters


 
Les nouveaux instruments de politique étrangère de l’UE, la création d’un service européen de l’action extérieure (SEAE), la nomination d’un Haut Représentant de l’Union aux Affaires étrangères et à la Politique de sécurité (Catherine Ashton), une nouvelle définition de la Politique Européenne de Sécurité Commune (PESC), la politique de voisinage, la politique d’aide au développement et à la coopération, comme l’instrument de stabilité. L’Union européenne a développé un réseau de 139 délégations dans la plupart des grands pays et auprès des organisations internationales importantes (par exemple l’ONU mais aussi l’AIEA, le WHO, etc.), délégations qui doublent les ambassades des Etats membres et ont souvent du mal à se coordonnées avec elles.

L’expérience européenne propose au monde un nouveau modèle de civilisation démocratique qui vise à promouvoir une approche multilatérale des relations internationales et le respect du droit international. L’ensemble des relations extérieures de l’Union constitue une sorte de diplomatie européenne, mais peu efficace. En outre, elle propose aux pays tiers un modèle, celui de l’intégration régionale, que d’autres parties du monde tentent de reproduire (comme le Mercosur en Amérique latine par exemple). Ce rôle souligne l’importance de s’appuyer sur une politique étrangère forte et de disposer de capacités d’interventions. Mais celles-ci sont limitées aux capacités individuelles de chacun des états membres et à leur volonté de s’engager. La puissance militaire européenne est aujourd’hui inexistence. Seul le Royaume-Uni et la France disposent d’une force militaire et nucléaire. Elle reste à construire et ce n’est pas demain la veille. Faute d’une diplomatie efficace soutenue par des moyens militaires ad hoc, trop souvent la capacité d’intervention de l’Union européenne ne va pas au-delà, malgré son poids économique. Ce qui limite sa capacité d’influence.

Pourquoi l’Union européenne ne pèse pas plus au plan mondial ?

La réponse à cette question est loin d’être évidente. Elle est difficile. Les raisons des causes sont différentes. Pour essayer d’apporter des éléments de réflexion, il peut être utile de retourner à l’essentiel, en particulier aux fondations de l’Union et à son fonctionnement.

Les fondations : D’abord et surtout, la base sur laquelle l’Union européenne s’est construite explique en partie cette situation de retrait à l’international. La construction européenne s’est d’abord faite de manière autarcique. Les six pays fondateurs ont d’abord mis en place des règles autarcique permettant à ces pays de mieux vivre entre eux en paix (traités de Rome : CEE, et Euratom, 1957. Tant que l’élargissement a concerné des pays périphériques des six, la politique européenne est restée focalisée sur des problèmes internes à l’UE. A partir de 1989, la disparition de l’Union Soviétique, la fin d’un monde bipolaire, l’intégration dans l’Union européenne de nations ayant appartenus au bloc soviétique ainsi que l’apparition de la mondialisation ont obligé dès 1992 l’Union européenne à mettre en place un début de politique étrangère et d’ébaucher une politique de défense pour peser sur les affaires du monde et protéger les intérêts de ses états membres.

Organisation de l’UE - Source : Wikipédia


 
L’Union européenne s’est donc construite à l’inverse des autres états fédérés (Etats-Unis, Russie,) qui ont d’abords mis en commun la politique étrangère et la défense et conservé dans une certaine mesure le domaine économique et financier. Ce qui explique pourquoi il est difficile pour les états membre d’abandonner une part du contrôle de leur domaine régalien au profit des instances Bruxelloises. Il arrive assez souvent que la politique européenne ne se substitue pas à celle des Etats et elle vient rarement la renforcer.

Le fonctionnement : les budgets sont votés pour six ans sur la base de programme dont la mise en œuvre et l’environnement évolueront beaucoup aux cours. Pendant le déroulement des programmes l’accent est plus mis sur la réalisation du programme à travers la consommation du budget que sur sa réalisation concrète et son impact. La lourdeur des procédures institutionnelles empêche la révision des programmes qui permettrait de les adapter à l’évolution du contexte. Par ailleurs, le contrôle de l’atteinte des objectifs est essentiellement financier, les aspects techniques passant au second plan. Il y a ainsi un manque flagrant de coordination entre les directions générales qui déroulent des programmes similaires dans les mêmes régions du monde sans qu’il y ait une coordination quelconque entre ces DG.

En conclusion

Le sort de la politique étrangère de l’Union et dans une moindre mesure sa politique de défense dépend de forces antagonistes. D’un côté, pour sortir de la crise il faudrait réfléchir à une réforme du fonctionnement de l’UE et à la défense de ses intérêts dans le monde. Ceci impliquerait un rassemblement politique et commercial. De l’autre, la tendance pourrait être le repli sur soi et sur la bureaucratie actuelle, vers un poids encore plus grand des états membres, les actions de politique étrangère et de défense étant assurées individuellement par chacun de ses membres, ceux-ci pouvant s’unir dans une alliance de circonstance sur un objectif commun pouvant très éloigné des intérêts européens.

Si les Etats membres décidaient de revoir le fonctionnement de l’UE, alors la mise en place de structure et de règles de fonctionnement plus simple, des objectifs mieux définis et mieux contrôlés permettrait déjà de gagner beaucoup en efficacité. A ce stade de la crise du projet européen, faut-il croire à une Europe forte ou à un simple conte de fée ?

Auteur MR [1]
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