La presse courante comme les médias sont peu bavards sur les opérations de restructuration des grands groupes industriels, de haute technologie et de service français. Les mouvements boursiers, les achats, les ventes, les rapprochements ou les fusions ne font pas l’objet d’« arrêt sur image », alors que les conséquences peuvent être très importante pour l’avenir économique en France. La Rédaction d’Économie Matin fait aussi le point sur la situation dans le monde.
C’est une véritable explosion. Depuis le début de l’année, les opérations de fusions-acquisitions (M&A) dans le monde s’approchent de la barre des 2 000 milliards de dollars (1 682 milliards d’euros), d’après les données compilées par Refinitiv. Le secteur technologique représente environ un cinquième de ce total. En France, le montant global des opérations de M&A depuis le début de l’année atteint les 213 milliards d’euros, un record depuis 2008.
- La Défense : le plus grand centre d’affaires d’Europe – source : Les Échos
L’exemple d’Equans
La cession d’Equans par Engie illustre bien cette tendance. Le fournisseur de gaz naturel et d’électricité verte souhaite se recentrer sur ses activités d’infrastructures et les énergies renouvelables, en se séparant de son entité de services multi techniques.
Début septembre, six acteurs étaient potentiellement intéressés par le rachat : des industriels (Bouygues, Eiffage et Spie) et des fonds d’investissement (CVC PAI-Partners, Bain Capital et Carlyle). Bouygues, Bain Capital et le groupe français Eiffage étaient encore en lice début novembre.
Mais c’est le géant du BTP et des télécoms qui a raflé la mise. Le 6 novembre 2021, Il a signé une promesse d’achat avec Engie pour 7,1 milliards d’euros. Il s’agit de la plus grosse acquisition de l’histoire du groupe, qui devient le numéro deux mondial des services multitechniques, derrière Vinci. « Le potentiel de synergies lié à la transaction est estimé, en régime de croisière, entre 120 et 200 millions d’euros par an, suivant les scenarii », a précisé Bouygues, qui souhaite faire passer la marge opérationnelle courante d’Equans au-dessus des 5 %, contre environ 3 % aujourd’hui.
- Fusions-acquisitions (M&A), une explosion mondiale
Attaquer ou se défendre
Deux mois plus tôt, c’est le groupe de défense et de sécurité Thales qui sortait de la signalisation ferroviaire en vendant son activité « ground transportation systems » (GTS) pour une valeur d’entreprise de 1,66 milliard d’euros. Le groupe d’électronique français avait officialisé début août son entrée en négociations avec Hitachi Rail. Une première étape vers une cession effective en fin d’année 2022 (voire début 2023).
« Thales sera un groupe plus simple, évoluant sur des marchés dotés d’une rentabilité à deux chiffres. Cette opération renforce notre structure de bilan et va nous conférer plus de puissance de feu en matière d’investissement en R&D ou d’acquisitions. Elle nous donne une vraie indépendance en matière de financement, si besoin était », a déclaré Patrice Caine, PDG de Thales.
Plus tôt dans l’année, Amundi, le premier gestionnaire d’actifs européen, signait l’accord d’acquisition de Lyxor, la filiale de gestion de Société Générale, pour un prix en numéraire de 825 millions d’euros. « L’acquisition de Lyxor sera un accélérateur du développement d’Amundi, car elle renforcera nos expertises, notamment dans les ETF [fonds indiciels cotés] et la gestion alternative », explique Yves Perrier, directeur général d’Amundi.
- Les bourses mondiales profitent de la reprise au 3ème trimestre
Après la finalisation de l’opération, d’ici à février 2022, « Amundi deviendra le leader européen de la gestion des EFT, avec 142 milliards d’euros d’encours combinés, une part de marché de 14 % en Europe et un profil diversifié tant en termes de clientèle que de géographie », ajoute la filiale du Crédit agricole.
« L’argent coule à flots »
Autre opération conclue récemment : le 21 septembre 2021, Universal Music Group (UMG) a quitté le giron de Vivendi en s’introduisant en Bourse. « Nous créons les conditions pour que la valorisation de Vivendi dans son ensemble soit supérieure à la somme des parties qui le composent », a expliqué Arnaud de Puyfontaine, président du directoire. Universal représente actuellement 92,6 % du bénéfice net groupe Vivendi, soit 452 millions sur 488 millions au premier semestre. A terme, Vivendi ne conservera que 10 % des actions de sa major, dont environ 18 % détenus par le groupe Bolloré.
Décidément, « les acquéreurs sont de retour sur le marché », comme l’affirme Antoine Piednoël, analyste en cessions-acquisitions au cabinet de conseil Cedexio. Certes, il s’agit en partie d’un rebond post-pandémie, mais c’est « plus qu’un effet de rattrapage », précise Bruno Bousquié, associé chez EY Parthenon. Les opérations traduisent un intérêt croissant des investisseurs pour des secteurs de pointe (tech, santé, etc.), une volonté de valorisation des entreprises achetées et surtout la nécessité d’attaquer ou de se renforcer après les bouleversements post-Covid.
En outre, comme le dit Antoine Piednoël, « l’argent coule à flots » grâce aux aides gouvernementales, aux politiques monétaires accommodantes des banques centrales
La Rédaction d’Économie Matin