Les décisions du Conseil européen seront soumises à la pression de l’Allemagne en quête de gaz russe pour satisfaire une part de ses besoins en énergie. La France assure depuis le début janvier la présidence de l’Union européenne. Ne pas confondre ! Quel rôle, quel impact pour tenter de limiter ces fortes augmentations de prix du le gaz et de l’électricité. Pour mieux comprendre les enjeux nous faisons appel à Michel Gay qui nous alerte dans un article paru récemment dans Contrepoints. Nous vous en proposons quelques extraits.
L’équilibre mondial des relations entre les nations est sous tendu par une guerre féroce, celle de l’accès à l’énergie, et notamment au gaz. Ce dernier s’avère de plus en plus nécessaire pour le chauffage et la production d’électricité dans une Europe qui veut réduire le nucléaire, le charbon, et promouvoir les énergies renouvelables intermittentes…
La guerre du gaz
L’Allemagne recherche depuis longtemps un partenariat privilégié avec la Russie en développant un nouveau gazoduc, appelé « Nord Stream 2 » qui la relie directement à la Russie en évitant l’Ukraine.
- Une source de gaz indispensable pour les États européens
Ce projet est porté par l’ancien chancelier allemand Gerhard Schroeder qui s’est reconverti dans le gaz russe, Il avait auparavant assuré l’avenir du gaz, en soutenant le plan de sortie du nucléaire allemand et la promotion des énergies intermittentes (éolien et solaire) assurant la dépendance aux centrales d’appoint… au gaz (russe), et aussi au charbon / lignite allemand.
Un parc nucléaire qui fait de l’ombre à l’Allemagne
Mais la France dispose encore d’un double avantage sur ses voisins grâce à son parc nucléaire :de faibles émissions de CO2 (6 gCO2/kWh pour le nucléaire, contre plus de 400 gCO2/kWh pour le gaz et 900 gCO2/kWh pour le charbon)
- Entre le charbon des « donneurs de leçons » une arme contre le nucléaire des « suiveurs » – Connaissances de l’énergie
Il en résulte qu’une augmentation significative de la taxe carbone est inacceptable pour l’Allemagne tant que demeure l’avantage considérable de la production électrique décarbonée de la France grâce à son nucléaire (environ 70%).
En mars 2018, extraits du rapport franco-allemand sur la transition énergétique à l’horizon 2030 :« L’évolution du parc de production nucléaire en France influera sur la rentabilité du parc à charbon en Allemagne. (…). À l’inverse, si des capacités nucléaires sont retirées du mix français, la compétitivité des centrales à charbon en Allemagne sera améliorée ».
Augmentation de la dépendance énergétique
Une réduction de la production nucléaire française d’électricité sera compensée par une augmentation de celle du gaz russe… transitant par l’Allemagne - dixit l’Office franco-allemand pour la transition énergétique (OFATE) -
L’axe germano-russe a déjà placé ses pièces maitresses dans le domaine du gaz. La Russie, l’Iran et le Qatar détiennent la majorité des ressources en gaz de la planète. Ils représentent une « Troïka du gaz » dont les sanctions américaines ne parviennent pas à entamer les liens. La récente mondialisation du marché du gaz grâce au transport maritime sous sa forme liquéfiée (GNL), bouleverse la donne de l’énergie.
Les idiots utiles
La ruine du secteur stratégique de l’énergie peut conduire à la prise de contrôle de la politique européenne par des puissances étrangères (Russie, Etats-Unis, Chine, …)
La Chine a déjà bénéficié du financement des pays « développés » protocole de Kyoto) pour plus de 300 projets éoliens financés pour la seule Mongolie intérieure. Ces financements principalement occidentaux ont aidé la Chine à devenir le premier constructeur mondial d’éoliennes et de panneaux photovoltaïques.
Amalgame entre objectifs et moyens
La politique énergétique européenne, confondant objectifs et moyens, se focalise sur le développement des énergies renouvelables du vent et du soleil. L’accès à l’énergie devrait être un enjeu majeur de l’élection présidentielle 2022 pour provoquer un débat public n’ayant jamais vraiment eu lieu. Des élus irresponsables et incompétents ont ouvert à l’aveuglette un chemin de croix pour l’industrie et les plus démunis.
- L’Union européenne a décidé la fin du nucléaire
Et maintenant ?
les dirigeants politiques français et européens doivent désormais pallier en urgence leur imprévoyance. Ils sont maintenant contraints à une fuite en avant pour tenter de corriger l’errance dans laquelle ils ont entraîné une nation et tout un continent.
Malgré l’évocation d’un monde plus solidaire et apaisé autour de l’écologie, le combat pour la maîtrise de l’énergie est violent : c’est celui du pouvoir, de l’indépendance, et de la survie des nations.
Et la géopolitique est cruelle pour les perdants. L’Europe se suicide en augmentant encore sa dépendance au gaz en remplaçant une partie de sa production nucléaire par des énergies renouvelables intermittentes. Sentant l’aubaine, des vautours rôdent.
Michel Gay